lundi 4 novembre 2013

Le Voleur d’âme


La journée du 19 juin était belle, ensoleillée, et le tumulte de la vie parisienne étonnamment calme alors que je me dirigeais vers le lycée Jacques Decour dans le IXe arrondissement. Nous devions nous y produire dans l’après-midi, dans le cadre d’un concert pour fêter les vingt ans de la Fête de la Musique, en partenariat avec le Ministère de l’Éducation nationale, NRJ et M6.

Je m’étais absenté ces dernières quarante-huit heures pour accompagner I Muvrini en Pologne. Bien que je me rappelle être resté l’oreille collée à mon téléphone, continuant à gérer et à organiser le planning de Yannick à Paris, je goûtai ces quelques heures passées à Varsovie. Le groupe se produisit dans la magnifique salle de l’Opéra, accompagné de son grand orchestre.
Quelle émotion de voir ce public polonais tout à l’écoute des chants d’Alain et Jean-François Bernardini. Que pouvaient-ils comprendre de la langue corse ? Cependant, je savais qu’il vibrait à la beauté des harmonies, au timbre des voix, à la ferveur de l’interprétation, en appréciant chaque instant. Alors que le public se levait pendant le concert et reprenait en chœur un chant en l’honneur du groupe, tradition rare à ce qu’on m’expliquât, réservée aux meilleurs accueils, je pensais songeur : « Que la musique rend la vie belle ! Pourquoi tous ces malheurs, haines, guerres inutiles ? La vie pourrait être si belle… »

J’étais heureux de rejoindre le lycée pour ce concert, de retrouver toute notre équipe, et même si je sentais des forces obscures s’affairer depuis quelque temps, je ne m’en préoccupais pas, faisant confiance à Yannick pour faire la part entre ce qui pouvait être dit et la réalité de ce que nous vivions alors ensemble.
Après avoir salué les musiciens, tout sourire à mon approche, je me dirigeai vers le podium de l’équipe technique. Quelques instants plus tard, j’aperçus Yannick me faisant signe de le rejoindre. J’imaginais un problème de son ou autre à régler, mais à l’écart de tous, il me tendit un courrier sans dire un mot en me regardant droit dans les yeux, je compris.

 
« Paris, le 18 juin 2001.

Cher Jean-Pierre,

Après avoir étudié les différents points de vue des uns et des autres, compte tenu de notre situation actuelle, il est clair que la décision qui s’impose aujourd’hui est de mettre fin à notre collaboration.

Cette décision est une décision, tu t’en doutes, purement professionnelle, et pour l’intérêt de notre groupe, nous devons repartir sur d’autres bases. Je ne tiens pas à revenir point par point sur les différentes sources de mésentente, mais la situation aujourd’hui n’est plus viable.

Nous sommes aujourd’hui à un carrefour important dans la vie des Zam Zam, et nous n’avons pas trouvé à travers ton travail de manager ce que nous espérions tous. Nous sommes conscients qu’il s’agit pour toi d’une désillusion, ce sentiment est réciproque.

Nous sommes conscients des efforts que tu as fournis tout au long de notre collaboration, mais aujourd’hui, quelque chose s’est brisé entre nous. Néanmoins, nous avons décidé de te reverser sur le prochain décompte de royalties de début novembre, une compensation financière d’un montant de 100 000 francs nets.

J’espère que tu comprends et acceptes notre décision et nous espérons, de notre côté, qu’on pourra se revoir dans un contexte plus détendu.

Amicalement,

Les Zam Zam »

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